Peintures et écologie : et si on grattait ?

Construire sa maison écolo, c’est bien. Aménager l’intérieur « écologiquement correct » c’est encore mieux. Quand on sait que l’air intérieur peut vite être contaminé par des composés organiques volatiles (COV), le choix de ce que l’on applique au mur a son importance. Enquête sur les peintures « écolos ».
Peintures naturelles, écologiques, saines… De plus en plus de fabricants de peinture surfent sur la vague « verte ». Face aux discours rodés par le marketing, difficile de déterminer les vrais efforts fournis par les fabricants en matière d’écologie.
Il n’existe aujourd’hui aucune définition officielle des « peintures naturelles ». Pour Jean-Pierre Pellegry, patron de Caséo, marque qui revendique la production de peintures naturelles, il s’agit de produits « n’utilisant aucun dérivé pétrochimique » et uniquement des substances 100 % naturelles, telles que la caséine. Selon lui, la majorité des fabricants exagèrent les propriétés naturelles de leurs produits. « C’est parfois vrai, sauf qu’en utilisant des alkydes d’huiles comme liant, ils utilisent ni plus ni moins que des résines synthétiques de la famille des polyesters. »
Même les fabricants de peinture traditionnelle qualifient volontiers certains de leurs produits de « naturels ». Une appellation galvaudée qui n’a absolument aucune valeur officielle. Ainsi, on admet généralement que le seuil d’émission de 200 µg/m3 ne doit pas être dépassé. Or, toutes les peintures « classiques » dépassent ce seuil 24h après l’application. Après 14 jours, la majorité continue même à polluer…
Le formaldéhyde, un « cancérigène certain »
Mais concrètement, quels sont les risques pour la santé à utiliser des peintures non naturelles ? « Les COV (Composés organiques volatiles, Ndlr), de minuscules poussières, se détachent jour après jour de vos murs et plafonds », expliquait Jean-Thierry Winstel, dans l’émission les Maternelles sur France 5. Des composés qui, selon lui, seraient « hautement cancérigènes. »
Du côté de l’UFC Que Choisir, on montre particulièrement du doigt le formaldéhyde, présent dans toutes les peintures. Certains fabricants de peinture naturelle comme Auro en ont bien conscience : « Le formaldéhyde est le polluant de l’air intérieur le plus inquiétant. Très irritant à faible dose, il a été classé cancérigène certain par le CIRC (Centre international de recherche sur le cancer) en 2004. » L’association de consommateur nuance toutefois le constat : « après un jour, la moitié des peintures en émettent mais à faibles concentrations. »
Il semble néanmoins que les fabricants de peinture « classique » aient fait des efforts depuis quelques années. En 2003, l’UFC que choisir affirmait que « les peintures polluent énormément (…). La plupart continuent à contaminer l’air intérieur bien au-delà de la phase de séchage et dans des proportions souvent inquiétantes. » Aujourd’hui, les résultats sont bien plus rassurants. « Nous tenons à saluer les efforts menés par les fabricants. Si les peintures naturelles Auro et Biofa décrochent toujours le prix d’excellence en matière de qualité de l’air, Dulux Valentine crème de peinture, fait son entrée dans ce club fermé des peintures ne polluant pas », notait l’UFC que choisir dans son magazine de mai 2006.
Des directives pour limiter les COV
Il faut dire qu’entre-temps, les lois ont changé et des directives ont été mises en place par l’Union européenne afin de limiter les COV.
Conséquence : la multiplication des peintures à l’eau beaucoup moins polluantes. Mais aussi celle des labels type NF environnement et/ou l’Ecolabel européen. Des gages qui certifient la teneur réduite en solvants, mais pas leur absence…
Et si tous les fabricants ou presque prennent désormais en compte les problématiques écologiques et que la situation est bien meilleure qu’avant, pourquoi utiliser des peintures naturelles ?
Des peintures naturelles… beaucoup plus chères
D’abord pour la qualité explique Jean-Thierry Winstel : « leur pouvoir de pénétration est plus important, elles sont perméables et donc, respirent ». En outre, elles sont vivement conseillées pour repeindre la chambre des enfants, beaucoup plus sensibles aux COV que les adultes. Idem pour les femmes enceintes : « Seule la peinture Auro (marque de peinture naturelle, Ndlr) est utilisable par une femme enceinte. Toutes les autres émettent des polluants à l’application », insiste l’UFC que choisir.
Néanmoins, des réserves peuvent être émises quant à la tenue de ces peintures. Il suffit de consulter de nombreux forums sur le sujet pour constater que de nombreux utilisateurs se plaignent, notamment sur le fait qu’il est impossible de les laver sans détériorer la couche.
Du côté du prix, là aussi, ça peut coincer si votre budget est serré. Les peintures naturelles se vendent essentiellement en poudre. C’est le peintre qui transforme lui-même la peinture à l’état liquide. Il faut compter environ 30 € pour obtenir 2,5 litres de peinture. Rien de très excessif en apparence. Mais quand un litre de peinture traditionnelle sert à couvrir une surface moyenne de 12 m², les peintures naturelles peinent à atteindre les 5 m². Une restriction que nuance Jean-Thierry Winstel. « Si votre support est vraiment propre, une seule couche peut suffire ».
Reste que la préparation de la peinture naturelle demande beaucoup de doigté. Pour offrir des produits « clé en main », sans préparation, Jean-Pierre Pellegry envisage de lancer une peinture liquide. Revers de la médaille : l’utilisation de « 0,1 % » de produits dérivés du pétrole…
Les 10 commandements du peintre « écoresponsable »
- Un masque et des gants en peignant tu porteras,
- Durant l’application, les fenêtres en grand tu ouvriras,
- Une fois l’application terminée, la pièce le plus longtemps possible tu aéreras,
- La pièce le maximum de temps possible tu quitteras,
- Les peintures parfumées tu éviteras. Leur odeur agréable n’est pas gage d’une absence de pollution,
- Pour ton bébé ou si tu es une femme enceinte, des peintures naturelles tu utiliseras,
- Le trop plein de peinture dans l’évier tu ne jetteras pas. Certains composants sont très nocifs pour le milieu aquatique.
- Dans la nature de la peinture tu ne te débarrasseras pas,
- A la déchetterie le pot de peinture tu porteras,
- Les pinceaux à l’eau tu nettoieras.